L'origine du sabbat
L'institution du sabbat (mot dont la racine en hébreu signifie "cesser") est au centre de la vie religieuse juive. Du vendredi au crépuscule au samedi à la nuit tombée, tout acte de création ou de fabrication est interdit. Cette fête rappelle que Dieu créa le monde en six jours et que le septième il se reposa (Genèse II, 2-3). Ce jour est consacré à la prière. La pratique du sabbat prescrite dans le Décalogue fut instituée par Moïse, mais son application serait plus ancienne. Les prescriptions du sabbat dans la Torah restant dans le vague, mais le Talmud a developpé des commentaires oraux apportant des précisions sur les activités prohibées (interdiction d'utiliser un moyen de locomotion, d'allumer ou d'éteindre une lumière, etc.).
Le premier soir, la maîtresse de maison allume des cierges ou une lampe dans les foyers. Le jour de sabbat se compose de trois repas accompagnés chaque fois d'une prière de sanctification récitée autour d'une coupe de vin, de la lecture de la péricope (section, paragraphe, groupe de versets) hebdomadaire de la Torah et, enfin, les parents bénissent les enfants. On assiste aussi à un office à la synagogue. La fin du sabbat est marquée par des cérémonies parallèles appelées havdalah. Ces rites domestiques sont repris à l'occasion des fêtes.
Si la permanence du sabbat est évidente, sa pratique a subi une constante accentuation au cours de l'histoire d'Israël. Son observance devint, en effet, de plus en plus stricte. Non seulement le travail était interdit, mais aussi toute tâche domestique. Cette rigueur s'amplifia au point d'entraîner d'étonnants comportements, tel celui des Maccabées en campagne, qui se laissèrent tuer sur place plutôt que d'enfreindre le respect du sabbat. Les esséniens, également, l'observaient en toute rigueur. Ainsi, dans toute période où les Israélites craignent la contamination étrangère et païenne, l'observation du sabbat se renforce et devient l'un des symboles de leur identité.
Jésus n'a pas aboli le sabbat, il l'a replacé dans un projet de vie. Ce jour-là, il se rend à la synagogue et y annonce la Parole de Dieu. Il dénonce, cependant, le légalisme outrancier qui accompagne l'observance du sabbat. Ce dernier devient alors un en-soi qui vaut pour lui-même, et la matérialité du geste inhibe l'observant. C'est pourquoi, là encore, Jésus défend l'urgente priorité de la charité, du secours à porter au prochain, sur la pratique matérielle d'un commandement. D'où la fameuse réplique, passée en proverbe, que Jésus fait à ses détracteurs: "Le sabbat est fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat".
Dans leur antijudaïsme, les populations chrétienne du Moyen Âge donnèrent le nom de sabbat aux réunions de sorciers et de sorcières. On était ainsi persuadé que certains jours, à minuit précis, les sorciers et les sorcières s'assemblaient dans un endroit isolé pour invoquer le diable et commettre toutes sortes d'actes abominables. Satan se rendait présent aux assistants, qui se livraient à d'épouvantables orgies accompagnées de sacrifices d'enfants. De surcroît, les sorciers et les sorcières jetaient des sorts à ceux ou celles qui n'adoraient pas le démon. Si la justice parvenait à s'emparer d'eux, les participants à ces cérémonies étaient torturés et mis à mort, en général sur le bûcher.
L'Église et les autorités temporelles se sont souvent servies de l'accusation de sorcellerie pour se débarrasser de personnalités gênantes, comme Jeanne d'Arc ou Urbain Grandier (affaire des possédées de Loudun, en 1634).